Balade à travers les siècles en Minervois
Notre territoire est pétri d’histoire et quasiment tous les lieux évoquent les siècles passés, même le moindre champ, cultivé souvent depuis d’innombrables générations. Il en est ainsi de la cité de Minerve, bâtie sur un lieu déjà occupé par l’homme au moins mille ans avant Jésus Christ et où les romains avaient établi leur Xème légion. La cité telle qu‘on la voit aujourd’hui est née au XIIème siècle et était à l’époque sous le contrôle des vicomtes de Minerve.
Edifiée sur un promontoire rocheux dressé entre les gorges du Briant et celles de la Cesse, deux rivières à sec l’été, Minerve était réputée inexpugnable.
Les vicomtes de Minerve adhéraient au catharisme, religion chrétienne qui considérait que le Diable était le créateur de la Terre et qu’il fallait donc mépriser les biens de ce monde pour accéder au paradis. A ce titre les cathares condamnaient les richesses et la corruption de l’église catholique. L’assassinat du légat du pape par des cathares (ou des provocateurs !) amena ce dernier à lancer une croisade contre ces « hérétiques » à laquelle participa le roi de France, Philippe Auguste, qui y vit l’opportunité de mettre la main sur les possessions des seigneurs d’Occitanie acquis au catharisme.
Minerve, comme bien d’autres villes d’Occitanie, fut assiégée en 1210 par l’infâme et cruel Simon de Montfort.
Bien protégée par les canyons qui l ‘entouraient, formidables défenses naturelles, Minerve résista vaillamment.
Mais Simon de Montfort installa, sur la rive opposée des gorges du Briant, un trébuchet, nommé la Malvoisinne, qui permit aux assaillants d’envoyer des blocs de pierre qui détruisirent le seul puits de la cité. Assoiffés, les assiégés se rendirent et cent quarante cathares qui refusèrent d’abjurer leur foi furent brûlés vifs. Ils furent néanmoins vengés car Simon de Montfort fut tué en 1218 lors du siège de Toulouse par des pierres lancées par des femmes assiégées. Notons au passage que pour les cathares les femmes étaient les égales des hommes ! Les cathares exterminés, il a fallut plus de sept siècles pour que l’on en accepte de nouveau le principe !
Aujourd’hui cette cité, dont la protection est assurée par un étonnant chien de garde, accueille généreusement les touristes qui y trouvent grand plaisir à arpenter ses ruelles bordées de maisons médiévales et de restaurants où les gosiers ne restent pas longtemps insensibles aux délicieux crus du Minervois. Aujourd’hui à Minerve qu’on se le dise, on ne meurt plus de soif !
Oubliés sont les temps de guerre et de famine et il règne dans les ruelles une atmosphère sereine propice à la méditation.
De talentueux artistes contribuent par leurs créations à créer cet environnement paisible où l'homme est réconcilié avec le monde environnant.
Mais on sait hélas que dans la réalité il en va autrement !
Aux visiteurs un brin aventureux, le site de Minerve réserve une étonnante curiosité : des ponts naturels creusés dans le sol par la Cesse que l’on ne peut visiter qu’en période « sèche » !
Comme souvent devant les œuvres de la nature, on est sidérés par le fantastique travail d’érosion accompli par un cours d’eau au flux intermittent !
Le premier tunnel (il y en a deux) long de 228 mètres est encombré dans son milieu d’énormes tronc d’arbres qui illustrent la violence des flots à la période hivernale.
Le site est enrichi de centaines de cairns édifiés par les visiteurs qui ont souhaité y laisser une trace de leur passage, sympathiques et étonnantes oeuvres éphémères, à l’image de nos vies que le flot du temps un jour emportera !
Certains cairns sont un véritable défi à la gravité et ont demandé dextérité et patience à leurs bâtisseurs ! Cela dit ces pierres doivent être ravies d’échapper un instant à leur destinée d’être constamment piétinées ou roulées par des flots impétueux!
Quittons Minerve pour nous rendre dans le hameau de Barroubio d’où part un sentier qui mène à la chapelle du Trou dite aussi de St jean de Dieuvaille, perdue au fond du canyon éponyme creusé par un modeste torrent nommé Eglise !
Je connais peu de lieux aussi isolés et sauvages et courageux sont les hommes et les femmes qui ont acheminé au fond du canyon les pierres nécessaires à l’édification de la Chapelle ! Mais il est vrai que la foi soulève les montagnes.
Le sentier qui y mène traverse une forêt de chênes verts. Il est symbolique que leur feuillage toujours vert ombrage le chemin qui mène à un lieu célébrant l’immortalité.
Pourtant, le sol en ces lieux n’est guère fertile et ne favorise pas l’éclosion des végétaux qui doivent briser la roche pour s’épanouir ! Penser à ne jamais traiter de « légume » les gens paresseux !
La puissance ahurissante dont fait preuve ce chêne est à l’image de ce lieu envoûtant et baigné de spiritualité. Car là s’illustre à merveille le mystère de la vie qui s’est développée envers et contre tout sur cette planète, autrefois entourée de gaz mortifères !
Nous arrivons à la chapelle, bâtie au XIIIème siècle sur les fondations d'un ancien ermitage. Ses bâtisseurs n’on pas « mégotté » et l’ont construite pour durer !
Son délabrement intérieur n’empêche pas d’admirer son élégance et la fresque murale qui représente Saint jean et Saint Pierre.
Saint Pierre est reconnaissable à la clé du Paradis qu'il tient dans ses mains. Cette clé énorme laisse penser que les portes dudit lieu ne sont pas en contreplaqué et que l'on ne doit pas facilement y entrer. Je suppose que depuis lors, St Pierre se faisant vieux, le maître de céans a dû ajouter quelques caméras vidéos pour dissuader les resquilleurs dont la vie de patachon ne leur permet pas de bénéficier du fameux sésame ! Mais à vrai dire je m’en fiche un peu car je préfère passer mon éternité avec quelques diablesses !
Un charmant - si, si, je maintiens le mot – cimetière jouxte la chapelle où les défunts semblent faire la sarabande vu l’état chamboulé de leurs tombes ! Mais qui peut les blâmer, sûrement pas les voisins qui sont à des lieux à la ronde !
Ce cimetière est également le lieu d'un phénomène étrange. On y voit, en effet, un chêne vert planté près d'une tombe dont les deux premières branches suivent les deux bras de la croix qui l'orne. On a le sentiment que l'arbre, dont les racines doivent entourer le cercueil du défunt, manifeste ainsi sa sympathie à son égard. Mais je ne suis pas étonné car l’on sait maintenant que les arbres sont des êtres sensibles capables de compassion !
Et puis on y trouve cette liane de salsepareille, friandise des Schtroumpfs, ornant de sa guirlande de cœurs la ramure d’un arbre et qui semble nous dire que l’amour est l’énergie de la vie et qu’il faut en emplir nos cœurs pour que le monde soit vivable. A cet égard, je concluerai en citant un extrait du roman "Le coeur de l'homme" de Jon Kalman Stefanson qui fait partie d'une trilogie comprenant "Entre ciel et Terre" et " la tristesse des Anges", passionnante saga islandaise peuplée d'une foule de personnages bousculés par la vie, l'hiver, la mer, et leurs sentiments : "Nous ne savons jamais dans quelle direction la vie nous emporte, ne savons jamais qui survivra à la journée et qui y succombera, nous ne savons pas si le dernier adieu sera un baiser, une parole amère, un regard blessant, il suffit que quelqu'un ait un moment d'inattention, qu'il oublie de regarder à droite pour qu'il meure, et alors il est trop tard pour retirer des paroles malheureuses, trop tard pour dire pardonne-moi, trop tard pour dire ce qui compte, ce que nous voulions dire, mais que nous ne pouvions pas articuler à cause de notre cruauté, notre fatigue, notre routine, du temps qui manque, tu as oublié de regarder à droite, je ne te verrai plus jamais et les mots que tu m'as dits continueront de résonner en moi chaque jour et chaque nuit, et le baiser que tu aurais dû recevoir sèchera sur mes lèvres où il deviendra une blessure qui se rouvrira à chaque fois que quelqu'un d'autre que toi m'embrassera." Aimons donc pendant qu'il est encore temps....
A la semaine prochaine pour d’autres merveilles….
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Texte & Photos Ulysse