Deux pères-grands à l’assaut du Roc Blanc
Chaque matin j’ai l’immense privilège de pouvoir décider de ce que je vais faire de ma journée. Vu qu’il m’en reste beaucoup moins à vivre que je n’en ai vécus, je veille à ne pas gâcher ces moments précieux à des billevesées ou des pseudos soucis. Comme je ne suis pas un fana de la clé à molette ni de la téloche, une fois ma contribution aux travaux ménagers accomplie je passe mon temps à lire, à gratouiller ma guitare et à marcher. C’est ainsi que ce matin, avec mon incontournable copain Gibus, je vous emmène à l’assaut du Roc Blanc, modeste sommet (944m) du massif de la Séranne, qui domine la sublissime vallée de la Buège. Le sentier part du pied d’une monumentale statue de la Vierge, érigée en 1893 à l’endroit même ou, selon une légende, un bouvier trouva une statue lumineuse et miraculeuse de Marie. Curieusement, l’aveuglante lumière qui irradie le ciel semble émaner de la statue. Mais n’ayant pas la foi, je pense que le soleil y est pour quelque chose !
Vous ayant dit que la vallée de la Buèges était sublissime, je mets, pour ceux de mes lecteurs qui sont comme Saint Thomas, une photo qui en révèle la beauté sauvage.
A une époque où partout le béton et l’asphalte grignotent le territoire, il est réconfortant de contempler d’aussi vastes espaces arborés, vierges de toute présence humaine. Nous avons peine à croire que nous sommes à moins d’une heure à vol d’oiseau des rivages bétonnés, souillés et surpeuplés de la Méditerranée.
On aperçoit d’ailleurs au loin la mer dont l’or qui la recouvre masque les souillures incessantes que les hommes lui infligent et qui la transformeront bientôt en cloaque vierge de toute vie marine. C’est le constat que fait Claire Nouvian, cette femme remarquable qui a créé la fondation Bloom pour préserver les ressources naturelles marines et publié un ouvrage de photo « Abysses » qui dévoile la faune extraordinaire des grands fonds et les dangers qui la menacent.
Après environ six cent mètres d’ascension, nous parvenons sur un plateau herbeux desséché par l’été ardent . Même les feuilles des arbres commencent à roussir à cause du manque d’eau. C’est curieusement une chose que je n’ai jamais éprouvé dans ma vie !
Empruntant un ancien chemin un peu chaotique délaissé par les randonneurs, nous avons la chance de croiser une harde de jeunes marcassins qui s’enfuient à notre approche. Il n’ y a pas d’espèce sauvage sur Terre qui ne fuie l’homme, tant notre réputation de tueur impitoyable est établie. Aux faux bergers de la Vallée d’Aspe qui « bêlent » contre l’arrivée d’oursonnes au prétexte que ces prédateurs n’ont pas vocation à vivre dans les Pyrénées, je rappellerai que ces magnifiques animaux y étaient nombreux avant que l'homme ne les extermine pour pouvoir y développer un élevage mercantile sans avoir à se protéger. Ecoutons Elise Thébault en parler, une vraie bergère favorable à la réintroduction de l’ours en Béarn.
Mais restons serein devant l’imbécilité ou la mauvaise foi de certains humains et contemplons le merveilleux spectacle qu’offrent à nos yeux les gorges de la Vis ….
….où l’on découvre un modeste village accroché sur le versant ensoleillé. Ses habitants doivent adhérer au dicton : "Pour vivre heureux, vivons cachés"
Au loin, on aperçoit la vaste échancrure du Cirque de Navacelles, grandiose site du causse du Larzac.
Par la magie de la technologie, je vous y « télétransporte » pour vous faire découvrir ce site incontournable du Languedoc.
Mais revenons au Roc Blanc dont nous achevons l’ascension sans peine, étant accoutumés à des randonnées plus sportives. C’est à la descente que les choses vont se corser un peu….
Pour le moment, tout va bien, le sentier est certes pentu mais confortable et le paysage toujours sublime.
Mais le sentier se dirige vers une arête rocheuse encombrée de végétation et fissurée par l’érosion où il vaut mieux regarder où on met les pieds que de contempler le paysage. Ce n’est pas un endroit où l’on croise beaucoup de pères-grands, comme nous le sommes. D’ailleurs Tom le petit fils de Gibus lui a dit un jour « Papy il faudrait peut être qu’avec ton copain Ulysse, vous arrêtiez de faire les marioles ». Bon, on a passé l’âge d’écouter les conseils de prudence !
Quel bonheur de cheminer ainsi sur une crête rocheuse et malgré l’absence d’ailes de jouir de la vue que peut avoir un oiseau. Nous n’échangerions notre place pour rien au monde, même pas pour une bouteille de Romanée Conti le vin le plus cher du Monde !
Car mieux qu’un bon nectar – et pourtant je les apprécie - ces randonnées sont pour nous un élixir de jouvence où nous rechargeons nos batteries de l’énergie tellurique qui monte du sol et de celle magnétique du soleil.
Le plus étonnant est que nous marchons sur le fond d’une ancienne mer qui occupait la région il y a cent millions d’années et que la surrection des Pyrénées a soulevé. Le calcaire dont il est constitué contient de nombreux fossiles marins que l’érosion qui le fracture met à nu ici et là.
Au bout de la crête, le chemin prend un cours plus paisible pour redescendre dans la vallée de la Buèges.
Parvenus dans la vallée, nous contemplons la ligne de crête que nous avons parcourue. Nous sommes toujours étonnés du chemin que l’on peut faire quand on met un pied devant l‘autre toute la journée !
Nous traversons le magnifique hameau des Prats qui montre le souci qu’avaient les anciens de l’esthétique de leurs habitations humaines et animales, alors que les paysans d’aujourd’hui, pour de tristes raisons pécuniaires, défigurent les campagnes avec leurs hideux hangars en béton brut et ferraille. Plutôt que d’entretenir un sérail de sénateurs qui, quoi qu’ils en disent défendent plus leur panse que le monde rural, subventionnons l’habitât paysan !
Nous passons au pied d’une colline érodée dont le flanc révèle les terribles turbulences qui ont affecté la région dans le passé. Souhaitons que cela ne se reproduise pas lors d’une prochaine randonnée !
Et nous voici en vue de la statue de Marie, point de départ de notre randonnée, à qui nous allons dans un instant conter respectueusement fleurette, une bonne et fraiche « blonde « à la main. Après 20kms et 700 mètres de dénivelé, une «1664» c’est meilleur qu’une bouteille de Romanée Conti !
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Texte & Photos Ulysse
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