Pèlerinage à la chapelle de Saint Amans
C’était au début d’octobre, après un été désespérément sec, les prairies étaient brûlées, la terre crevassée et les cueilleurs de champignons au chômage. Me souvenant que dans le passé, face à une telle situation, les anciens faisaient un pèlerinage à la chapelle de Saint Amans pour que la pluie vienne, je propose à mes amis Gibus, Jo et Bernard de raviver cette tradition. Nous voilà donc partis, de bon matin, du col de la Défriche dans les monts d’Orb en direction de cette miraculeuse chapelle. Du col nous apercevons le village d’Olmet encerclé d’une mer de chênes verts. Des nuages bas nous privent du soleil sans pour autant daigner désaltérer la terre assoiffée.
Nous traversons le village de Villecun où l’ancien lavoir est encore abondamment alimenté par une source épargnée par la sécheresse. Le jour où elle sera tarie, nous aurons du souci à nous faire !
Puis nous suivons l’antique voie qui mène au village de Lavalette, mettant nos pas dans ceux des passants innombrables qui au cours des âges l’ont empruntée.
Nous passons devant la chapelle troglodyte taillée dans un bloc de grès au 19eme siècle par le dernier curé de Villecun. Le nom de Falgaret lui vient des fougères qui l’entourent. La foi permet non seulement de soulever les montagnes mais aussi de creuser les rochers !
Nous passons devant des arbres morts de soif dont les silhouettes fantomatiques préfigurent peut être l’aspect de notre planète dans quelques décennies.
Nous approchons du village de Lavalette dont la devise semble être «Pour vivre heureux, vivons cachés» car les maisons y sont encerclées d’arbres.
Un château domine le village édifié au XVIème siècle par les seigneurs de Lavalette (qui ont donné leur nom au village) et qui fut restauré au XVIIème siècle après avoir été endommagé pendant les guerres de religion.
Aucune âme ne semble y vivre mais il est vrai que le village compte plus de moineaux que d’habitants.
Nous arrivons sur les hauteurs, royaume des fougères prématurément fanées par la fournaise de l’été passé.
Le soleil, ayant finalement réussi à s’imposer, nous gratifie d’un joli spectacle en avivant leurs couleurs mordorées.
Sur la crête nous apercevons la chapelle qui émerge à peine des fougères, modeste oeuvre humaine dans cette nature sauvage où les nuages sont nos seuls compagnons de voyage.
Cette chapelle a été édifiée en 1870 sur le chemin menant de Bédarieux à Lodève à travers l'Escandorgue (actuel GR7) en l’honneur de Saint Amans, évangélisateur de Lodève et de Rodez. Jusqu’au début des années 1900 en période de sécheresse elle faisait l’objet d’un pèlerinage pour faire tomber la pluie.
Selon les chroniques de l'époque, le pèlerinage se déroulait comme suit : Dès la sortie de Lunas,qui se trouve au pied de la montagne, le curé invoquait tous les saints et il y en avait une belle liste ! La foule des croyants à chaque nom répondait «Ora Pro Nobis» (priez pour nous). Le curé était accompagné du sacristain Boultouli qui portait le pique-nique et une bonne bouteille car le curé aimait bien boire en mangeant.
Arrivé près de la chapelle, la liste des saints épuisée, le curé priait le bon Dieu de cette manière : « Dius qué fo plaouré baïla nous d’aïga » (Dieu qui fait pleuvoir donne-nous de l’eau). Le sacristain répondait alors: «d’aïga amaï dé vi » (de l’eau et aussi du vin) et le curé ajoutait: «Dius té ausi Boultouli » (Dieu t’entende Boultouli).
Finalement pessimistes quant au succès des prières pour faire pleuvoir vu la forme des nuages, nous oublions le pèlerinage et nous nous contentons d’admirer le panorama grandiose qui s’offre à nous. Certains de mes fidèles lectrices et lecteurs reconnaitront peut être le massif du Caroux en face que nous avons grimpé d’innombrables fois.
L’heure tournant, nous imitons les curés des temps passés et faisons dans un pré la pause pique-nique accompagnée, cela va de soit, d’un flacon de «sang» du Seigneur. Je n'ai pas besoin de faire une prière à Dieu pour qu'il y en ait toujours un dans mon sac !
Puis nous prenons le chemin du retour, poussés par la Tramontane qui ébouriffe les cheveux de mes compagnons (moi je suis « immunisé ») et les feuillages des arbres.
Qu’ils sont revigorants ces chemins qui se déroulent jusqu’à l’horizon, promesse de paysages toujours renouvelés.
Bientôt nous apercevons le village d’Olmet proche de notre point de départ et qui émerge dans un panorama qui, comme l’a superbement écrit l’une de mes lectrices, gonfle l’âme.
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Après cette balade, je vous invite à aller sur mon blog musical
Canta-la-Vida
pour écouter ma chanson " Cours Emilie ! "
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Texte & Photos* Ulysse
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