Eldorad-Oc

Mettant en pratique l’emblématique publicité «un Mars et ça repart» des années 90, nous voilà repartis en ce frais matin de mars  à  l’assaut de l’Espinousse par la voie qui conduit à la chapelle Saint Martin du Froid. Le temps couvert qui règne sur le littoral ne nous a pas découragés et notre détermination est récompensée car l’on aperçoit déjà un coin de ciel beu qui se déchire sur les sommets.

King Kong, qui s’est réfugié dans les parages après sa mésaventure new yorkaise, fait  la gueule d’être réveillé de si bon matin  par le bruit de nos bâtons qui soulagent nos genoux vieillissants, mais il nous laisse passer sans nous importuner. Contrairement à ce que laisse penser  la chanson «Gare au gorille» de ce bon vieux Georges, cette espèce est bien plus pacifique que la nôtre peuplée de trop nombreux «Vladimirs".

Parvenus au col de Bardou, nous nous engageons dans l’antique draille tracée par les anciens pour emmener leurs bêtes paître sur le plateau sommital. Sans leur travail titanesque, nous n’aurions pas la possibilité de parcourir ces magnifiques montagnes et chaque fois, en pensée, je les remercie ! 

Au fur et à mesure que nous nous élevons, le soleil se fait plus généreux, ce qui ne plait guère à nos ombres qui raclent les cailloux !

Par contre nos yeux sont à la fête comme nos âmes qui volètent au dessus de cette mer de monts bleutés au sein de laquelle nous prenons tant de plaisir à naviguer.

Il manque une seule chose pour que notre bonheur soit parfait : voir en ces lieux évoluer des mouflons mais hélas comme les nemrods bedonnants qui se déplacent an 4X4 y sévissent comme partout ailleurs, ceux ci fuient les hommes et ne nous laissent voir que leurs crottes! Certains accueillent à coups de fusil le discours «pipeautien» des autorités sur la nécessité de préserver la biodiversité! Et si la régulation de certaines espèces apparaît nécessaire, confions cette tâche aux loups dont, au demeurant, nous n'avons rien à craindre au contraire des dangereux nemrods !

Nous arrivons sur le plateau où se dresse à 1064m la modeste chapelle St Martin du Froid en un lieu où a été retrouvé un sarcophage mérovingien et qui depuis des siècles sert de signal et de refuge. Habituellement, on y voit la ligne enneigée des Pyrénées mais l’horizon est aujourd’hui barré par une ligne de nuages.

Un vent frais y soufflant, nous décidons de redescendre dans la pente hors sentier pour chercher un coin abrité pour y pique-niquer.

Bien nous en a pris car le paysage se révèle somptueux. Nous ressentons un plaisir ineffable à partir ainsi à l’aventure, dévalant entre les chaos rocheux et posant peut être le pied là où aucun homme avant nous ne l’a posé, Neil Amstrong des montagnes de l’Hérault !

Nous zigzaguons entre les menhirs sculptés par les éléments qui mettent à rude épreuve nos articulations usées par les ans.

Nous y croisons des êtres extraordinaires comme ce fayard aux milles branches qui semblent vouloir nous retenir au passage.

Ayant contourné un chaos rocheux un formidable château de pierre s’offre à nos yeux, étonnant relief que les éléments n’ont pu abattre !

Quelles forces telluriques l’ont ainsi fait jaillir des entrailles de la Terre  en plein milieu d’un talweg * ? C’est devant ce fascinant spectacle que nous pique-niquons en nous souhaitant (sans y croire 🤪) de rester debout aussi longtemps que cette imprenable citadelle, tout en dégustant un jus de raisin fermenté du pays d’Oc, divin sang de cette région bénie des dieux !

* vallon montagnard pentu

Nous revenons sur le sentier en ahanant, ralentis par la digestion de nos agapes, pour redescendre de façon plus confortable vers le col de Bardou.

La descente permet d’admirer à loisir le paysage ce que ne permettent pas les efforts déployés à la montée où nous avons plutôt le bout de nos godasses comme horizon !

Devant nos yeux se déploie le massif du Caroux, avancée méridionale du massif de l’Espinousse et que recouvre une étole de nuages.

Bien qu’elle culmine à 1091m cette montagne a tout d’une grande surtout que nous partons souvent de la plaine ce qui, avec les tours et contours des sentiers,  nous fait généralement faire  entre 800m et 1000 mètres de dénivelé. C'est tout à fait respectable pour des septuagénaires avancés que nous sommes, d’autant que nous en revenons frais comme des «gardons». Bon on ne va pas non plus en boite de nuit danser après une journée de rando !

Vous connaissez mon amour des arbres et je ne peux m’empêcher de vous montrer ce jeune «hercule» qui a soulevé le rocher sous lequel il a eu la malchance de pousser !

A défaut de mouflon, nous apercevons une tortue juchée sur un promontoire rocheux qu’aucun lièvre n’est encore venu défier !

A vrai dire les lieux sont quasiment déserts comme je le déplorais plus avant et mis à part King-Kong, une tortue et quelques corbeaux nous n’aurons vu, de la journée, âme qui vive. 

Mais cette journée passée loin de l’agitation perpétuelle de la société humaine et de son babillage médiatique qui ressasse en boucle des nouvelles de plus en plus préoccupantes sur l’évolution du monde ou les insanités et éructations de Débile Ânouna et de ses acolytes nous régénère.

Ces journées nous inscrivent dans une échelle de temps cosmique en nous confrontant à l’histoire de la terre et à ses perpétuels soubresauts qui nous rappellent combien éphémère est une existence humaine et qu’il faut éviter de la gâcher avec des préoccupations oiseuses et «égotiques». Nous étions poussière et nous redeviendrons poussière, en attendant évitons si possible les balais !

Et pour éviter les balais rien de tel que de se "bouger le cul" et d’arpenter les sentiers plutôt que de rester affalé dans un canapé! (n'est ce pas mon doudou!😜).

Plus nous descendons et plus cette «petite» montagne apparaît impressionnante et nous ne sommes pas peu fiers de pouvoir encore la grimper !

Nous voilà revenus au col du Bardou qui domine le joli hameau du même nom. Il nous reste quelques centaines de mètres avant de retrouver nos chères blondes qui nous raviront de leur fraîche mousse pour célébrer cette nouvelle ascension de l’Espinousse !

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