Avec le petit loup au dessus des gorges de Madale
Romain, notre dernier petit loup descendu de Paris pour les vacances, (sa soeur Emilie prépare le bac et a préféré y rester) a daigné, âme charitable, aller randonner avec deux papis, en l’occurrence Jo et moi, bonne action qui lui vaudra assurément le paradis! Honorés de sa présence, nous avons décidé de choisir un parcours assez technique qui va nous emmener au dessus des gorges du torrent de Madale qui entaillent le flanc Est du massif du Caroux.
C’est effectivement un parcours sportif réservé aux randonneurs aguerris ayant le sens de l’orientation. On sait dès le début de l’ascension à quoi il faut s’attendre…
Romain cavale en tête mais nous savons qu’il devra nous attendre car le sentier n’est pas balisé et évolue au milieu d’éboulis rocheux où il n’est pas facile à repérer malgré les cairns que des mains secourables ont édifiés.
Aspirés par notre jeune compagnon et malgré nos coeurs qui datent du milieu du XXème siècle, nous prenons vite de l’altitude et découvrons en contrebas le hameau de Madalet, haut lieu de rencontres amicales franco-belges et d’émouvants souvenirs !
Nous traversons une forêt de chênes verts dont certains sujets d’un âge vénérable agitent leurs branches sur notre passage admiratifs de notre détermination. C’est la solidarité des vieilles branches !
Contraints de contourner des chaos rocheux, nous basculons pendant un moment sur le flanc qui domine la vallée de l’Orb.
Puis nous revenons au dessus des gorges du Madale bien plus étroites et sauvages que celles de Colombières et d’Heric plus facilement accessibles aux randonneurs.
Un sentier permet de les remonter sur la rive droite que nous avons emprunté avec Gibus il y a une dizaine d’années mais qui présente quelques risques d’autant qu’il a fait l’objet d’éboulis scabreux à franchir. Autant dire que nous ne sommes plus en état d’y retourner !
C’est un grand bonheur de traverser ces chaos rocheux qui confèrent à notre cheminement un parfum d’aventure. Nous redoutons ce moment qui viendra inéluctablement où nous ne parcourrons ces chemins que par le biais de nos souvenirs….si nous en avons !
Peu à peu le panorama s’élargit sur la haute vallée de l’Orb qui a droit à la dénomination de fleuve, malgré son modeste débit, vu qu’il emmène ses eaux jusqu’à la mer !
Le Caroux est une montagne étonnante qui malgré sa modeste hauteur - il culmine à 1191mètres - comporte de formidables parois rocheuses qui font le bonheur des alpinistes! Même les alpins et les pyrénéens viennent s’y entrainer car la roche est très solide et les conditions climatiques agréables.
Tout un bestiaire y a trouvé refuge qui ne se laisse voir que par ceux qui comme moi sont atteints de paréidolie ! Quelle belle maladie !
Le Caroux est l’une des plus vieilles montagnes du monde, vestige du massif hercynien né il y a 300 millions d’années et qui a connu des périodes mouvementées qui l’ont porté par deux fois à plus de six mille mètres ! Mais le temps a fait son oeuvre comme on le voit aussi sur nous, fragiles humains !
Après avoir atteint le plateau du Suquet, il nous reste à grimper sur la crête de Coudière ce qui n’est, pour nos jambes entrainées, qu’une formalité.
En quelques enjambées, nous voilà au sommet après deux heures de crapahut, c’est à dire deux heures de bonheur, la marche en montagne étant le meilleur euphorisant que je connaisse.
Nous nous y installons pour pique niquer en jouissant d’une vue panoramique sur la montagne de Rosis et les monts de l’Espinousse, lieux de superbes randonnées.
Nous redescendons par le flanc Sud du Caroux émerveillés par le camaïeu de verts de la végétation printanière qui contraste avec la ligne bleutée des avant-monts que domine le pic de Vissou. Gaïa est une grande artiste !
La descente se fait par de confortables pistes forestières où l’on se met en «roue libre» empli d’un intense sentiment de plénitude qui vibre à l’unisson de la vie secrète qui irrigue les arbres qui se réveillent après l’hiver.
Mais soudain dans cet univers serein, un cri terrible retentit poussé par un vénérable châtaignier. Lui caressant l’écorce pour manifester notre sympathie, nous lui demandons quelle est la cause de sa souffrance. Il nous répond que les hommes, qui pendant des décennies les ont, lui et ses frères, entretenus pour se nourrir de leurs fruits, les ont aujourd’hui abandonnés, laissant les maladies les ronger et les abattre. Ils étaient autrefois les rois d’une civilisation rurale dont leurs châtaignes étaient l’or brun, ils ne sont plus aujourd’hui que des vieillards décharnés rongés par la vermine. Nous lui répondons qu’il ne faut pas perdre espoir et que vu le tour pris par la civilisation humaine, ils seront, probablement dans un proche futur, de nouveau choyés et honorés. En effet, lui dit-on, neuf milliards d’êtres humains sont attendus en 2050 qui vont transformer les plaines et vallées de la Terre en zones commerciales et en lotissements. Ils manqueront alors de terres pour les nourrir et certains se souviendront que les châtaigniers s’accommodent des pentes arides des montagnes et produisent des fruits nourrissants. Rasséréné le châtaignier nous remercie pour ces propos d’espérance et nous confie qu’il va désormais consacrer les quelques forces qui lui restent à assurer sa descendance en prévision des temps difficiles à venir pour l’espèce humaine.
Nous poursuivons notre chemin, heureux d’avoir rendu le moral à un vieux châtaignier. Encore une manifestation de la solidarité des vieilles branches !
Cette maison au toit béant où vécurent sans doute ceux qui ont planté les châtaigniers reverra aussi des jours heureux quand les hommes auront compris qu’il n’y a de vraie vie qu’au contact de la nature et non pas dans les univers virtuels mortifères que les gourous californiens veulent nous imposer.
Quelques flaques subsistent des pluies intenses de la semaine passée qui capturent un instant notre reflet. Avons nous conscience que les moments de notre existence véhiculés par les photons que nous projetons sans cesse voyagent à travers l’infini !
Nous approchons du point de départ et Romain laisse de bonne grâce Jo prendre la tête. C’est un jeune garçon intelligent qui sait ménager l’amour propre des anciens !
Nous voilà revenus au pied de ce formidable Caroux qu’on ne se lasse jamais de contempler.
Tant que mes jambes pourront m’y emmener la vie vaudra d’être vécue !
Pour obtenir le tracé du circuit (en jaune) cliquez ci-dessous
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Mon copain Gibus a écrit un second roman que vous pouvez vous procurer
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Canta-la-Vida
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La confiance.....
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TEXTE & PHOTOS ULYSSE
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