En route pour Rosis, la montagne d’or !
Notre pouvoir d’achat est en berne mais le cours de l’or n’a jamais été aussi élevé et les bijoutiers nous font ainsi des offres mirobolantes pour racheter nos bijoux de famille (les vrais !). Un conseil donc: ne dormez pas la bouche ouverte sous peine de vous réveiller sans vos couronnes en métal doré. On sait pourtant que l’or rend fou mais ça ne calme pas pour autant la frénésie de ses adorateurs. Qui possède un million en veut deux; qui en a deux en veut quatre et ainsi de suite, tous ces millionnaires étant engagés dans une compétition forcenée pour être le plus riche macchabée du cimetière. Heureusement épargné par cette frénésie grâce à l’attention sans faille de mon inspecteur des impôts (qu’il en soit remercié) je vous propose de partir en quête du seul or qui vaille, de cet or qui ne corrompt pas mais enchante : l’or des genêts qui fleurissent dès la fin mai sur la montagne de Rosis.
Nul besoin d’exploiter ou de truander son prochain ou d’appartenir à la confrérie des banquiers, assureurs, sénateurs, bijoutiers, horlogers ou fripiers pour pouvoir contempler cet or là. Bien au contraire! Des goûts simples, l’aptitude à l’amitié et à la solidarité ainsi que de bons mollets sont de rigueur. Tout ce que l’on risque dans l’aventure c’est de prendre un bain non désiré dans le torrent qu’il faut traverser pour partir à l’assaut de cette somptueuse montagne.
La beauté de cet endroit vous donne, je n’en doute pas, l’envie de séjourner quelques jours dans cette masure. Profitez en, car pour le moment elle est libre ! Certes le confort en est plus que sommaire et les voisins, mulots, fouines, mouflons, n’arrêtent pas d’aller et venir la nuit, mais quel bonheur de pouvoir assister au lever et au coucher du soleil sur ces genètières (ou ginestières).
Outre leur somptueuse beauté, ces genètières tiennent le sol, évitant ainsi l’érosion. Autrefois, elles étaient broutées par les moutons et servaient, notamment dans le lodévois tout proche, à fabriquer de la toile plus résistante que celle en chanvre ou en lin.
Nous arrivons en vue d’un lieu familier à mes plus fidèles lectrices et lecteurs : le portail de Roquandouire, curiosité géologique située sur le chemin qui mène au hameau de Caissenols et au Plo de Bru.
Cet étonnant vestige d’une couche sédimentaire mise à la verticale par la surrection des Pyrénées est un lieu idéal pour faire une halte un jour de grand vent, qu’il vienne de la Méditerranée ou de la Montagne Noire .
Si l’or en barre n’a pas d’odeur (bien que certains aient du flair pour le repérer !) celle des genètières est envoûtante et nous prenons de la hauteur pour ne pas en être grisés.
Parvenant, ahanant et soufflant, en vue du Plo de bru, un arbrisseau nous tend une branche secourable pour nous aider à franchir les derniers mètres. Nous déclinons son offre charitable de peur de le briser. Ce n’est pas que nous soyons lourds car sveltes - vous n’en doutez pas je l’espère - nous sommes. Mais nos sacs, eux le sont, car chargés de nombreux flacons (leur contenu relève du domaine privé)
Cet arbrisseau n’est que l’avant-garde d’une vaste pinède qui couvre la partie orientale du Plo de Bru et abrite un champ de myrtillers, témoin d’un sol léger et acide. Les baies riches en vitamine C et en polyphénols sont délicieuses. Malheureusement il est déconseillé de les consommer dans les régions où le renard est malade de l'échinococcose ou "ténia du renard" à cause du risque de contamination à l'homme. C’est pourquoi nous sommes contraints d’aller chercher nos polyphénols dans le jus de vitis-vinifera (les plus mauvaises excuses font le sel de la vie).
Ayant atteint le col de l’Ourtigas, nous redescendons vers le hameau de Caissenols pour y faire la pause pique-nique. Quelques amoureux de ce lieu l’ont restauré et l’entretiennent pour le plus grand bonheur des randonneurs de passage. Je saisis l’occasion, si jamais ils me lisent, de les en remercier chaleureusement.
Il faut dire que c’est un lieu idyllique hiver comme été où l’on peut se livrer sans vergogne (pourquoi vergogne y aurait-il d’ailleurs ?) à une sieste à l’air libre ou sous abri. Les polyphénols du raisin auraient, paraît-il, outre leur bénéfice pour la santé un effet légèrement soporifique.
Sortis de nos flacons vides comme le génie de la lampe d’Aladin, un bestiaire fantasmagorique vient alors peupler nos rêves. On y voit ainsi le taureau de Crète poursuivi par Hercule…
Soudain le barrissement de l’un des éléphants perdus par Hannibal au cours de son périple nous réveille en fanfare pour nous signaler qu’il est temps de lever le camp.
Et là, sur le chemin du retour, une émouvante scène nous attend : Un mouflon juvénile accompagné de sa mère sont sur le sentier. Grâce au vent contraire la mère ne nous a pas sentis venir et continue de brouter. Le juvénile qui n’a jamais rencontré d’homme et n’a donc pas appris à le craindre nous regarde ébahi, instant d’étonnement pour lui et d’émerveillement pour nous, gratifiés par cette confiance spontanée et innocente.
Mais la mère, mue sans doute par son instinct, lève la tête et nous découvre : stupeur et effroi se lisent dans son regard !
En une demi seconde c’est la fuite ! Cette scène illustre la piètre image dont jouit l’homme dans le monde sauvage où la rumeur court, aussi bien sur la terre, dans le ciel que sous la mer, que nous sommes des prédateurs impitoyables. Et me reviennent en mémoire ces images insupportables d'un documentaire animalier, où l’on voit un chasseur embrasser la crosse de son fusil chaque fois qu’il tue un animal. Bourreau sans merci et pitoyable ayant autant d’intelligence qu’une bûche et imperméable à la beauté du monde. J'espère que ces "bûches" là brûleront , au moins quelques jours, en enfer !
Chères lectrices et lecteurs qui connaissez les talents de grimpeur de mon ami Gibus sachez que sa plume est aussi alerte que ses gambettes et je suis heureux de vous annoncer la publication de son premier roman " De l'eau aux sables" qui vous emmènera dans une aventure palpitante jusqu'au Sud marocain.
Vous pouvez vous le procurer sur ce SITE
ou en le commandant chez votre libraire
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Texte & Photos Ulysse
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