Toujours aussi beau, le vallon de Clapeyto !
Quand on est jeune on se croit invincible et immortel et parfois ce sentiment vous conduit à des actes funestes. Approchant les trois quarts de siècle, je suis un peu plus prudent afin de ne pas donner l’occasion à la Camarde de me faire sournoisement un croc en jambe. Mais il n’est pas question pour autant que je reste vautré dans mon canapé comme une moule sur son rocher. J’entends profiter pleinement des heures qui me restent et je ne rate pas une occasion d’aller courir les montagnes.
Me voici donc une nouvelle fois parti avec des amis pour un séjour « Raquettes » dans le Queyras, notre camp de base étant le paradisiaque gîte-auberge de la Vie Sauvage à Prats Hauts (à proximité de Molines) tenu par Marc et Claudine. Ici on trouve chaleur humaine et toute l’expertise et l’encadrement pour parcourir le Queyras à pieds, en raquettes ou à skis !
La vie montagnarde en hiver est rude et les anciens en savent quelque chose qui allaient chercher l’eau, été comme hiver, aux fontaines publiques. Mais à la Vie Sauvage l’hiver devient une saison agréable où après une journée à parcourir les pentes enneigées du Queyras vous rechargez vos batteries (et vos bourrelets) avec le vin chaud et la cuisine du terroir de Marc !
Nous effectuons notre première sortie en direction du vallon de Clapeyto, où nous sommes déjà allés les années passées, mais la nature est comme une œuvre d’art où l’on découvre des beautés cachées à chaque nouveau regard.
Ce matin la sensation de froid est aiguisée par le vent et chacun se recroqueville au cœur de son anorak. Quand on a ainsi à lutter contre les éléments, notre sentiment d’existence s’en trouve décuplé, en particulier quand on a les mains et les pieds gelés !
C’est une balade assez peinarde avec une ascension très progressive qui laisse le loisir d’admirer le paysage. L’avantage de la raquette est que l’on doit tenir deux bâtons ce qui empêche de tenir en même temps un « smartphone », outil diabolique que l’on voit aujourd’hui dans les mains des touristes du monde entier qui passent ainsi leurs vacances à contempler leur écran plutôt que les sites qui les entourent.
Nous arrivons près des chalets de l’Echaillon, étape intermédiaire où nous faisons la pause de « dix heures » aussi attendue que le « quatre-heures » par les enfants des écoles primaires. Il est paradoxal que les repas prennent de plus en plus d’importance chez les seniors alors que leur organisme consomme de moins en moins d’énergie !
La contemplation de champs de neige vierges de toute trace est un élixir de jouvence qui nous donne le sentiment de naître au monde.
S’il n’y avait pas le pain à aller chercher chaque matin et à condition également que la cave et le cellier en soient bien remplis, je me verrais bien hiberner dans l’un de ces chalets à gratter la guitare. Mais il est possible que les loups, lièvres, chevreuils et chamois du coin n’apprécient pas mes hululements !
Nos ombres glissent en silence sur la neige mais ne se plaignent jamais du froid. Leur passage aura prolongé peut être de quelques secondes la vie des flocons qu’elles auront caressés !
Nous attaquons – lentement mais surement – un dernier goulet pentu qui mène au vallon. La montagne est une école d’endurance et de persévérance qui fortifie autant l’esprit que les mollets !
En montagne il est facile de reconnaître le guide, c’est toujours le type qui sourit même quand la pente est à 40% et qu’il fait moins vingt degrés !
Au loin nous apercevons un groupe de raquetteurs qui ne semblent guère plus grands que des fourmis au pied du bien nommé Pic de Roche Noire. Il est sidérant de constater que l’homme, cette minuscule bestiole au regard de la Terre, puisse lui occasionner autant de dégâts en fouillant sans vergogne ses entrailles, en y abandonnant ses montagnes de déchets et en polluant ses océans et rivières. Mais prenons garde, peut être qu’un jour un « Gulliver » extra terrestre viendra donner des coups de pied dans les fourmilières humaines que sont devenues nos méga-cités, à moins qu’un gigantesque déluge ne vienne tous nous submerger quand auront fondu banquises et glaciers.
Mais le cadre idyllique dans lequel nous évoluons, nous fait oublier le sort funeste qui menace l’humanité et que décrivent fort bien Pablo Servigne et Raphaël Stevens dans leur essai « Comment tout peut s’effondrer » (Editions du Seuil) à lire et à méditer pendant qu’il est encore temps.
Il n’y a rien de plus régénérant et rassérénant que d’évoluer dans un environnement d’une telle pureté, bercé par le crissement ouaté de la neige sous les raquettes .
Nous faisons une dernière halte avant de plonger vers la vallée, dominés par le Pic de Baudouis dont la paroi sud est le lieu de fréquentes avalanches qui rendent dangereux en cas de chute de neige le sentier qui la gravit et que l’on a emprunté le matin même.
La fin de notre périple n’est que silence et volupté dans une ambiance féérique que crée le soleil qui commence à se coucher dans sa couette de nuages mordorés.
Si on ne craignait pas le froid et si la cuisine de Marc n’était pas aussi bonne, nous pourrions être tentés de faire comme ces grands arbres et d’y passer la nuit !
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Texte & Photos Ulysse
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