Le Caroux par la piste des charbonniers
N’ayant pu randonner cette semaine,
je poste le récit d’une mémorable randonnée faite il y a quelques années
Chacun dans la vie a son «Graal» : un but difficilement accessible qu’il aimerait accomplir. Pour certains c’est gravir l’Everest, le Mont Blanc, la Dune du Pyla, les marches du perron de l’Elysée, pour d’autres c’est de faire un marathon, traverser la Manche à la nage ou la piscine de Pénélope Cruz ou de Julia Roberts. Pour moi, amoureux du Caroux, c’était de le gravir par la voie la plus difficile (hors parcours d’escalade que je ne pratique pas) : c’est à dire la piste dite "des charbonniers." C’est en effet un parcours équipé par endroits de chaînes et dont certains passages impliquent d’utiliser une corde. On l’appelle ainsi non pas parce qu’elle menait autrefois à des lieux de production de charbon de bois (ce qui serait impossible vu les lieux) mais parce qu’il faut avoir une foi de charbonnier pour l’affronter ! Personnellement convaincu que «le ciel» est indifférent à notre sort et qu’il vaut mieux compter sur quelqu’un que l’on connaît bien (soi même) et sur Gibus plutôt que sur quelqu’un que l’on ne connaît pas (dieu, vichnou , allah , zeuss ou toute autre divinité ) je fais part à mon ami – qui a déjà emprunté ce sentier- de mon projet. Nous nous engageons donc un beau matin (condition indispensable) dans les gorges d’Heric d’où part la piste.
A vrai dire, ce n’est même pas un piste mais une vague trace qui traverse dans sa première partie une zone d’éboulis dans lesquels des cairns permettent de garder le cap. L’objectif est d’atteindre le plateau sommital derrière les sommets que l’on aperçoit au dessus de nous en contre-jour.
Passés ces éboulis, on atteint la base d’une paroi équipée de chaînes que Gibus en montagnard expérimenté et prudent examine avant que nous nous y engagions. Etant aussi souple qu’un fauteuil Louis XVI je sens en moi une petite poussée d’adrénaline.« Mon vieux » (c’est malheureusement chaque jour un peu plus vrai) me dis-je « le vin est tiré il faut le boire » sauf que ce vin là ressemble plutôt à du vinaigre !
Gibus me fait une magnifique démonstration dont l’aisance me donne confiance. Mais désireux de conserver votre estime, vous n’aurez pas droit à ma photo car je n’ai absolument pas le même style !
Au terme d’un passage délicat dans un goulet resserré nous parvenons sur un premier palier où nous faisons une pause. En contemplant le chemin parcouru, je comprends que quelque soient les difficultés à venir il me serait personnellement difficile de faire demi tour.
Heureusement le tronçon suivant se révèle un peu moins difficile et nous offre un répit qui me permet de récupérer quelques forces.
Mais le répit est de courte durée car une nouvelle paroi se dresse bientôt devant nous qui me met, au sens propre comme au sens figuré, au pied du mur ! C’est dans ce genre de situation que l’on apprend ce que l’on a vraiment dans le ventre (outre le petit déjeuner du matin ). Et j’avoue sans fausse modestie que, le style mis à part, je ne me suis pas déçu, car j'ai franchi l'obstacle sans trop de difficulté. Et puis c’est toujours avec plaisir que s’offre une occasion de lever un « toast » à notre exploit avec mon ami Gibus (mais bon, on n’en est pas encore malheureusement à l’heure de l’apéritif).
On arrive en vue d’une deuxième plateforme qui nous permet de reprendre notre souffle (ce qui est absolument nécessaire parce que qu’il faut être « gonflés à bloc » pour emprunter cet itinéraire).
Nous apercevons environ 700mètres en contrebas le fil blanc du torrent Heric qui sinue au fond des gorges d’où nous sommes partis. Concentrés sur notre ascension nous n’avons pas vu le temps passer et sommes surpris d’être déjà si haut.
D’ailleurs, les pics de pierre qui émergent à notre niveau nous indiquent que nous sommes près du but .
Il nous reste un dernier passage délicat à franchir, mais, dopés par les difficultés déjà vaincues, nous survolons ce dernier obstacle (Bon, soyons honnête, dans mon cas le terme « survol » est j’en conviens un peu exagéré et c’est pour ça que vous avez droit à la photo de Gibus).
Enfin, nous touchons au but ! La joie et la fierté m’envahissent. Il faut dire qu’à mon âge où l’on passe son temps à chercher ses lunettes et le titre du film que l’on a vu à la télé la veille au soir, les motifs de fierté se font rares ! Alors quand on en tient un, on en profite !
Et puis la vue dont on jouit du plateau nous récompense des efforts accomplis et des pincements intestinaux ressentis !
Soudain, ébahis nous entendons une voix de stentor qui nous dit «Bravo les gars, ça faisait longtemps que quelqu’un n’était pas grimpé par là » Nous nous retournons et apercevons le Génie du Caroux - chaque montagne a son Génie qui protège son domaine - qui nous fait un large sourire puis retourne à son immobilité, soucieux de ne pas abandonner la surveillance dont il est chargé.
Le laissant à sa noble mission, nous traversons la plateau couvert de bruyères en fleurs, à la recherche d’un endroit ombragé pour pique-niquer et célébrer dignement (une première fois) l’événement.
Puis nous redescendons dans les gorges par le chemin traditionnel bordé de superbes vasques dont les eaux rafraîchissantes nous permettent de refaire le plein d’énergie pour achever notre périple. Deux belles blondes (Heine & Ken) nous attendent dans notre voiture avec lesquelles nous célébrons dignement (une seconde fois) notre exploit (parce que nous le valons bien !).
Heureux hommes nous sommes qui avons trouvé notre Graal !
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Chères lectrices et lecteurs qui connaissez les talents de grimpeur de mon ami Gibus sachez que sa plume est aussi alerte que ses gambettes et je suis heureux de vous annoncer la publication de son premier roman " De l'eau aux sables" qui vous emmènera dans une aventure palpitante jusqu'au Sud marocain.
Vous pouvez vous le procurer sur ce SITE
ou en le commandant chez votre libraire
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Texte & Photos Ulysse
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