Moments extatiques au mont de Sainte Scholastique
Nous voilà partis avec l’ami Jo, du village de Liausson, en ce beau matin de début mars, à l’assaut de la crête des Lousses qui domine la rive sud du lac du Salagou lové dans un écrin de ruffes rouges brodées de vert.
Le sentier surplombe le Pioch de la Sure, cône d’un ancien volcan reconnaissable à la tache sombre de lave grise qui recouvre en partie son sommet. La chaine des volcans du Cantal s’étend de fait, jusqu’à la Méditerranée, au Cap d’Agde, où l’on peut voir encore dans la baie de la Conque des coulées de lave.
Il n’ y a pas un souffle d’air et les eaux du lac sont un parfait miroir pour le ciel.
Vers l’extrémité ouest du lac se dresse le neck basaltique d’un autre ancien volcan.
Nous dépassons le lac pour nous diriger vers le mont de Sainte Scholastique qui domine la plaine de ses modestes 502 mètres. Au loin nous apercevons le Caroux et le massif de l’Espinousse recouvert d’une écharpe de nuages.
Mais avant d’attaquer le mont Sainte Scholastique il nous faut redescendre vers la plaine ce qui n’effraie pas nos jambes qui bien que d’un âge vénérable, affectionnent les dénivelés.
Nous passons près d’un enclos à moutons où seuls deux agnelets ont le courage ou l’inconscience de venir à notre rencontre, ignorant que nous appartenons à une espèce qui les affectionne sous forme de côtelettes !
Nous traversons une forêt de chênes verts dont la formidable vitalité crée un treillis de branches inextricable.
Le sentier qui accède au sommet du mont Sainte Scholastique est l’un des plus pentus que je connaisse mais nos ventricules sont accoutumés à ce type d’exercice et nous y amènent sans trop s’affoler. Le mont a été ainsi nommé car une chapelle dédiée à Sainte Scholastique y a été édifiée probablement à l’époque paléochrétienne wisigothique et aurait donc 1400 ans. Mais avant elle les romains y auraient peut être érigé un petit sanctuaire dédié au Dieu Mars d’où l’autre nom donné à ce modeste sommet.
Sainte Scholastique était la soeur jumelle de Saint Benoit fondateur de l’ordre des Bénédictins. Elle se consacra comme lui au Seigneur et vint habiter non loin de son frère dans un monastère au pied du Mont-Cassin en Italie. Elle le rencontrait une fois par an, dans une petite maison située à mi-chemin. C’est là que pressentant sa mort et désirant passer la nuit en entretien spirituel avec son frère, elle obtient du ciel un orage si violent qu’il empêche Saint benoît de partir. Inspirés par ce miracle, les gens de la région édifièrent cette chapelle en hommage à la sainte pour y faire procession en cas de sécheresse afin de faire tomber la pluie. Cette tradition dura jusqu’à la fin du XIXème siècle. L’histoire ne dit pas si les processions étaient efficaces ! Toutefois, ce que nous observons c'est que durant notre ascension le ciel s'est couvert de nuages! Etonnant, non !
Nous nous installons en ce lieu paisible pour y pique-niquer émus, bien que mécréants, par l’ambiance spirituelle qui y règne et qu’entretiennent des épitaphes écrites sur des bouts de tuile en hommage à des défunts. Pour notre part, au cours de nos agapes, nous rendons hommage à Bacchus, éprouvant un sentiment extatique de nous intégrer dans l’histoire millénaire de ce lieu ou des cohortes d’humains sont venus prier.
Nous croyons être seuls mais tout autour la vie foisonne comme ces mousses et lichens qui ornent l’écorce des arbres et auxquels nous sommes secrètement liés, toute vie sur terre ayant un ancêtre commun. De fait le paradis des croyants est un éternel ballet d’atomes qui nous fait voyager à travers le temps et les êtres.
Nous redescendons sur le versant sud du mont Sainte Scholastique par un sentier qui nous mène vers la zone dolomitique du cirque de Mourèze. L’Hérault est un fantastique puzzle géologique qui nous fait passer en quelques kilomètres des ruffes rouges vieilles de 200 millions d’années à d’anciens sédiments marins vieux de cent millions d’années.
Le ciel se charge de plus en plus de nuages et nous fait craindre la pluie, nous prions saint Scholastique d'attendre un peu - on ne sait jamais - et nous pressons le pas.
Au sommet de la falaise qui nous surplombe, nous apercevons la tête d’un mérou saisi pour l’éternité dans sa gangue de pierre.
Nous marchons ainsi au fond d’une ancienne mer et au vu des évolutions climatiques accélérées par l’homo sapiens la mer y reviendra bientôt ! La vie n’est qu’un éternel retour !
Signe manifeste du réchauffement climatique en cours, les terribles chenilles processionnaires qui dévastent les pinèdes sont déjà descendues de leur cocon. Surtout ne pas y toucher sous peine de finir à l’hôpital !
Nous voilà revenus à Liausson niché au bord du lac du Salagou qui a perdu ses éclatantes couleurs du matin. Une ambiance propice à voir surgir un monstre comme celui du Loch Ness !
Je vous invite à aller également sur mon blog musical
Canta-la-Vida
pour écouter ma dernière chanson
Une jeune fille au bord de la rivière
et aussi sur mon blog Palabres
Pour y découvrir mon dernier article
Prière à Jésus....
(lien direct dans la barre de navigation de l'en tête de ce blog)
Texte & Photos Ulysse
A découvrir aussi
- Le Caroux par la piste des Aiguilles et du Rieutord
- En raquettes dans le Queyras : le belvédère du Mont Viso
- Avec les petits loups à l’assaut du cirque de Tournemire