Par monts et merveilles via le château de Malavieille
L’Hérault où je vis est, dit-on, le paradis des géologues. Situé à mi-chemin entre les Pyrénées et les Alpes et bordant la Méditerranée, ses sols ont été plusieurs fois envahis par la mer et bouleversés par la surrection de ces deux chaines de montagne. Ainsi, de vieilles strates sédimentaires (200 millions d’années) se sont retrouvées au dessus des plus récentes, comme ces ruffes rouges que nous arpentons pour cette nouvelle randonnée qui va nous mener aux ruines du château de Malavielle.
Nous sommes dimanche matin, jour du seigneur pour les chrétiens, mais nulle messe n’est donnée dans l’antique chapelle St Fulcran blottie au creux du vallon que le Lignous a creusé dans les ruffes. Il faut dire que les humains se sont lassés d’implorer un dieu qui laisse commettre tant de vilenies sur notre planète. Il est vrai qu’il aurait mis sept jours pour édifier l’univers et il a bâclé son boulot!
Nous venons de traverser une période de sécheresse mais l’observation du sol nous apprend que notre région en a connu d’autres dans un très lointain passé comme en témoignent ces plaques de dessiccation fossilisées qui donnent l’illusion que le sol a été pavé.
Ma photo précédente pourrait vous faire croire que nous marchons le nez penché vers nos godasses comme le font certains randonneurs qui suivent aveuglément leur guide en bavassant et ne savent jamais où ils sont allés. Mais, nenni, nous sommes à l’affut de toutes les beautés que la nature nous offre comme ces superbes inflorescences de la clématite des haies. La tige couverte de duvet dont sont dotées ses graines leur permet de voler et de coloniser d’autres lieux. Ainsi grâce à l’anémochorie, les plantes voyagent! A noter que la «belle» est dangereuse et est également appelée "herbe aux gueux", surnom qui lui vient du fait qu'elle était utilisée par les mendiants au moyen âge pour provoquer des irritations de la peau. Ils frottaient directement le feuillage sur leur peau pour susciter la pitié des passants.
Parvenus au col de la Bouzigue* nous découvrons un panorama atypique avec le village de Brenas édifié à l’écart de son église alors que généralement celle-ci est placée au centre, d’où vient l’expression «remettre l’église au centre du village» qui, en France, veut dire faire en sorte que les convenances et les traditions soient respectées. Notons qu’en Suisse, elle veut dire donner tous les détails, toutes les précisions possibles, afin d'expliquer clairement quelque chose à quelqu'un qui ne comprend pas ou ne veut pas comprendre. Et enfin, en Belgique, elle signifie garder la tête froide. Faire en sorte qu'il n'y ait pas de conflits ou, s'il y en a, ramener la sérénité.
*ce mot vient d’une déformation du vocable gaulois boudica devenu en occitan bosiga qui correspond à un terrain gagné sur la forêt en le défrichant par le feu
Nous empruntons vers le sud la piste qui suit la crête du Planas d’où nous découvrons le bassin versant du Salagou dominé par le neck de la Roque, chicot de lave érodé jaillit d’un ancien volcan.
Au bout de la piste, nous apercevons le castelas de Malavieille. Qu’il est plaisant en ce monde pressé, où nous papillonnons dans notre univers numérique à la vitesse de la lumière d’une info à une autre, d’un sujet à un autre, d’approcher d’un lieu, pas après pas, en se gavant du décor terrestre et céleste qui donne corps à chaque instant qui passe. Ainsi les heures passées sur les chemins ont la longueur des kilomètres parcourus.
Nous arrivons à proximité du castelas bâti sur le neck d’un ancien volcan le rendant pratiquement imprenable.
On sait peu de choses de ce «castrum» sinon qu’il aurait été édifié au XIIème siècle par le seigneur de Malavieille et qu’un village se serait étendu sur les pentes alentour jusqu’au XVème siècle.
Ses bâtisseurs, qui ne manquaient ni de courage ni d’audace, ont épousé le profil du neck de lave pour construire les fortifications.
Il n’en subsiste que quelques pans de murs dont il vaut mieux ne pas trop s’approcher sous peine de prendre le risque d’aller rejoindre les mannes des ses occupants !
Le château domine un somptueux paysage de ruffes érodées qui donnent le sentiment de contempler la chair à vif de notre belle planète !
Ces sols ingrats que la végétation peine à coloniser préfigurent peut être le visage qu’offrira notre planète quand on l’aura complètement dévastée !
Nous redescendons par le versant nord du piton en direction du hameau de la Lieude, dont le nom rappelle qu’on y prélevait une «leude» ou péage.
Le sentier est bordé d’autres curiosités géologiques comme ces «poudingues» rochers constitués d’amas de galets et graviers charriés par d’anciennes rivières, liés par un substrat gréseux et compactés par d’énormes pressions.
Redescendus du piton sur lequel est perché le château, nous passons près de la plaque de la Lieude ou des mammaliens (ancêtres des dinosaures) ont laissé leurs empreintes il y a deux cents millions d’années.
Vu d’en bas, on comprend que nul intrus mal intentionné ne pouvait échapper à la vigilance des guetteurs du château. Mais à vrai dire le temps que les soldats descendent de leur forteresse les lascars avaient le temps de commettre leur forfait et de s’enfuir. Et puis l’histoire nous enseigne que les châteaux ont très souvent été des nasses où ceux qui y vivaient mouraient de faim de soif ou de maladie lors d’un siège. Les cathares, hélas, en ont fait la dure expérience!
Notre randonnée se termine par la visite d’un édifice à priori dédié à un dieu de miséricorde. Mais combien de crimes a-t-on commis et commet-on en son nom ou au nom d'autres dieux. L’histoire nous enseigne qu’il faut se méfier des discours officiels et des apparences. Combien de "sauveurs" ont mené leur pays à la ruine! Mettre un pied devant l’autre oxygène le cerveau et aide à réfléchir et à ne pas prendre des vessies pour des lanternes. Oubliez de temps en temps les écrans et marchez ….sans regarder vos godasses !
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Je vous invite à écouter ma chanson
Le temps d'un thé.....
Sur mon blog Canta-la-Vida
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