Pèlerinage à la chapelle St Martin du Froid
Nous sommes le mardi 4 mai et depuis la veille nous avons retrouvé la liberté d’aller et venir à notre guise en notre beau royaume de Gaule. Pour célébrer cet heureux événement, nous décidons de faire un pèlerinage à la chapelle St Martin du Froid posée sur le plateau de l’Espinousse à plus de mille mètres d’altitude. Ce n’est pas que nous soyons croyants – l’homo sapiens est trop pervers et le monde trop foutraque pour avoir été créés par un dieu soi disant sensé et miséricordieux - mais le symbole de Saint Martin partageant son manteau avec un pauvre grelottant de froid nous incite à aller en sa compagnie partager le pain et le vin entre amis pour fêter nos retrouvailles.
Il était temps que l’on nous rende notre liberté car le mois de mai est le mois où la vie de nouveau explose faisant reverdir la nature et jaillir de terre les jeunes pousses de fougère.
Nous passons en surplomb du hameau isolé du Bardou niché au fond d’un vallon sauvage où coule le torrent éponyme. Il a été réhabilité dans les années 1970 par des «esstrangers» (dit avec l’accent du coin !) séduits par le lieu.
Nous croisons dans les bois le «Grand méchant Loup» qui à vrai dire n’a rien de méchant et qu’il est moins dangereux de rencontrer que des chasseurs qui cette année encore ont fait des «cartons» sur d’innocents promeneurs ou coupeurs de bois !
Puis nous empruntons un court moment le GR7 qui mène vers le sommet du Caroux en passant par le hameau et les gorges de l’Heric. Le GR suit une antique draille caladée qui reliait autrefois les villages et permettait d’accéder aux terrasses cultivées ou d’emmener, l’été, les troupeaux vers les pâtures d’altitude. Elle témoigne du génie et de l’opiniâtreté des anciens dont la vie n’était que labeur. Que leur mémoire soit honorée car ils nous permettent aujourd’hui de parcourir ces lieux magnifiques.
Nous quittons bientôt le GR pour suivre une autre draille qui mène sur l’Espinousse. Derrière nous se dresse le rocailleux et abrupt massif du Caroux, avant poste du massif de l’Espinousse plus arrondi et forestier.
Qu’il est réconfortant de sentir de nouveau, dans notre poitrine, notre cœur battre la chamade. Nous nous sentons revivre à l’image de ces arbres parés d’un brouillard vert de jeunes feuilles.
La draille grimpe en grands lacets confortables, profil idéal pour une reprise, vu l’âge de nos abattis!
Peu à peu notre vison s’élargit sur le monde alentour que l’on embrasse du regard. Notre âme, pendant longtemps confinée aux mornes horizons de la plaine, s’en trouve ragaillardie !
Ces lieux, aujourd’hui déserts sont parsemés d’antiques bergeries où les arbres y ont trouvé un refuge idéal et remplacé les moutons.
Nous arrivons à la chapelle de Saint Martin du Froid perchée à 1066m. Elle servait autrefois de signal et de refuge en hiver, en cas de tempête de neige ou de brouillard.
Car le qualificatif thermique qui lui est accolé témoigne de la température qui y règne l’hiver, comme mes fidèles lectrices et lecteurs s’en souviennent sans doute au vu des randonnées dans la neige que nous y avons faites avec mon copain Gibus dans le passé et dont voici une photo souvenir.
Habituellement on y jouit d’une vue magnifique sur les Pyrénées qui sont aujourd’hui estompées par la brume. On devine néanmoins le fil de neige des sommets qui flotte dansl'horizon bleuté juste en dessous d’une ligne de nuages. Vous comprenez sans doute en contemplant ce paysage pourquoi nous tenons tant à aller «là haut» au pays des mouflons et des nuages. Contrairement à ce que les canapéphiles prétendent, nous ne marchons jamais pour rien, sauf si contempler la beauté du monde est «rien». Et il est vrai que dans le monde «d’en bas», celui des hommes, où tout est monétarisé, soumis au critère de rentabilité, la beauté d’un paysage est une «non valeur» sauf si l’on peut y construire des hôtels de luxe pour en tirer profit.
En regardant vers l’Ouest, on aperçoit le mont Gros et sa tour d’observation des incendies et juste derrière le Montahut, joli sommet rocailleux, que nous avons tant de fois grimpé que nous avons usé son sommet qui a diminué de quelques millimètres !
Après la pause-pique nique et quelques instants passés sur un confortable et odorant lit d’aiguilles de pins en compagnie….de Morphée, qui ne l’oublions pas est du sexe masculin - mais nous avons l’esprit ouvert - nous entamons la redescente.
Nous craignons que les nuages plus abondants que le matin ne se déchirent sur les aiguilles rocheuses mais ils passent, indifférents, sans déverser leur cargaison d’H2O - cet étonnant liquide que certains fadas boivent - sur nos têtes.
La pluie, le vent le gel et le soleil se sont prêtés main forte pendant des millions d’années pour sculpter ces monstres fantasmagoriques dans les parois rocheuses. C’est un peu à quoi nous ressemblons en vieillissant Botox ou pas Botox !
A chaque passage en ces lieux, je vérifie si ce rocher qui défie les lois de la pesanteur est encore en place et ne menace pas de chuter. Au cours de ma carrière de randonneur j’en ai déjà vu de nombreux tomber sur les chemins empruntés et je suis devenu méfiant !
Dans les endroits bordant des zones dangereuses, les drailles sont bordées de murs de pierres pour éviter aux moutons de s’égayer. Travail pharaonique qui mérite notre respect !
Parvenus dans le vallon, nous faisons un détour par le hameau de Bardou superbement restauré. Pour y vivre il faut aimer l’isolement car il est situé à une demie heure par une petite route de montagne du village de Mons.
Il faut aussi être bricoleur et inventif comme en témoigne ce barbecue fabriqué avec une vieille bétonnière.
Malgré la dureté des conditions de vie, cette habitante à la mine sereine semble fort heureuse de vivre ici loin des gabegies consuméristes des adeptes d’Amazon, du brouhaha du monde et des désordres occasionnés par la Covid et autres saloperies made in China dont on risque même de recevoir une fusée sur la poire ! Même leur vaccin anti-covid ne vaut pas tripette !
Mais nous partageons cette sérénité car comme l’affirme la pancarte postée par un facétieux randonneur sur le tronc d’un arbre le long du chemin, oui une journée passée à Saint Martin ça fait du bien !
Chères lectrices et lecteurs qui connaissez les talents de grimpeur de mon ami Gibus sachez que sa plume est aussi alerte que ses gambettes et je suis heureux de vous annoncer la publication de son premier roman " De l'eau aux sables" qui vous emmènera dans une aventure palpitante jusqu'au Sud marocain.
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Texte & Photos Ulysse
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