Sur les pas d'un ange !
Partir en randonnée de bon matin me remplit d'allégresse. La luminosité donne à chaque chose un présence plus intense; j'ai le sentiment que l'univers vient de naître, sorti du néant de la nuit, et que, sous les mille aspects de sa matérialité, se cache celui que les amérindiens appellent Wakan Tanka, le dieu créateur.. De fait, du «big bang» qui s'est produit il y a quinze milliards d'années, et qui a projeté des milliards de trillards de tonnes de matière en fusion aux quatre coins de l'univers, sont nés, entre autres merveilles, la rose, les ailes d'un papillon, vitis vinifera et le sourire de la Joconde, on ne peut donc qu'être convaincu de la nature spirituelle de l'univers. Ce sentiment, je l'ai éprouvé pleinement en empruntant le chemin qui mène au sommet du Mont Mars qui domine le lac du Salagou.
On passe au préalable par le sommet des Lousses qui offre des vues somptueuses sur le lac entouré d'un damier de vignes et de champs qui brodent leurs arabesques végétales sur la terre rouge des ruffes.
Soudain, après un virage brutal du sentier que je négocie avec dextérité, je tombe nez à nez avec le sphynx et entame une conversation avec lui:
«Bigre! que faites vous ici, vous avez quitté le Caire!»
«Oui il fait trop chaud là bas et puis j'en avais marre des touristes qui n'arrêtent pas de me photographier sans même me demander la permission!»
"Je vous comprends. Ici au moins vous êtes tranquille, vous voyez sans doute plus de corbeaux que d'être humains. Mais ne vous fatiguez pas à me poser votre énigme pour m'autoriser à passer, je connais la réponse! »
« Tant mieux, j'en ai un peu ras le bol de raconter toujours la même histoire, allez, passez et bonne route !»
Je passe ensuite devant les ruines d'une antique bergerie drappée dans un magnifique tunique de lierre. La beauté architecturale de l'abri destiné aux animaux mérite notre admiration. A mon avis la qualité du lait et des fromages dépend pour beaucoup de la qualité de l'environnement dans lequel évoluent les bêtes et c'est pour celà que le Salers l'emporte sans conteste sur le Gouda !
Là encore l'agencement des pierres donne au lieu une dimension spirituelle, car derrière l'oeuvre l'on perçoit l'intelligence du bâtisseur, alors que les murs de parpaings bruts qui envahissent nos villes et bordent les maisons sont des oeuvres «mortifères» témoins de notre époque où pérorent les crétins sur les réseaux sociaux et les chaines de télé du "Beauf Loré".
Moi qui pensais partir pour un lieu sauvage et désert, je n'en avais pas fini avec les rencontres extraordinaires, car voici qu'après avoir franchi un éperon rocheux j'aperçois la tête d'un guetteur coiffé d'un casque antique surveillant la vallée !
Je comprends très vite ma méprise et découvre qu'il s'agit,de fait, d'un simple rocher émergeant de la falaise. Mais après réflexion on peut se demander si ce n'est pas la réincarnation dans le monde minéral d'un amoureux des lieux (un ancien berger ou charbonnier du coin?) dont le désir de «finir ses jours» en ces lieux a été exaucé. L'univers est spirituel vous dis je !
Mais, je ne suis pas au bout de mes surprises car un peu plus loin je tombe nez à nez avec le faciès d'un gorille, manifestement somnolent, émergeant de la végétation. Connaissant le caractère pacifique de ces primates je ne m'effraie pas outre mesure et je passe mon chemin, le laissant à sa méditation.
Après ces péripéties, je parviens enfin au sommet du Mont Mars, dénommé aussi "de Sainte Scholastique" en raison de la présence des ruines d'une antique chapelle dédiée à la soeur jumelle de St Benoit (fondateur de l'ordre des bénédictins).
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Je me repose un instant dans ce havre de paix puis explorant ces modestes ruines, je découvre dans une niche du mur d'enceinte plusieurs pierres gravées du nom de randonneurs étant passés en ce lieu au fil des ans. Parmi ces pierres l'une d'elles attire particulièrement mon attention. En effet, un prénom y est gravé «Marie-Ange-Noël» accompagné du dessin d'un soleil et d'un message « à bientôt ».
L'émotion me saisit alors car j'ai comprends qu'il s'agit d'un message adressé à une défunte, enfant, jeune fille ou femme, par l'un ou plusieurs de ses proches lui signifiant ainsi qu'il(s) la rejoindrai(en)t au ciel bientôt, tant est brève la vie humaine face à l'éternité. J'ai alors une pensée pour cet «ange» sans visage, une soeur d'humanité dont le souvenir repose sous les étoiles en ce lieu empli de sérénité. Cette dernière «rencontre» me conforte dans ma conviction que le monde est spirituel et que tous les chemins mènent au paradis, un paradis où se retrouveront les hommes de bonne volonté et de toutes croyances qui pensent que nous sommes venus sur terre pour tendre la main à nos semblables et, quand c'est possible, partager une chopine de bon vin avec eux. Après être resté à méditer quelques instants en ce lieu émouvant, c'est en cheminant en pensée avec Marie-Ange Noël, que je retourne fourbu mais plein d'allégresse dans mes pénates.
Je vous invite à écouter ma chanson
Qui se souviendra de nous ?
sur mon blog Canta-la-Vida
(lien dans la barre de titre)
TEXTE & PHOTOS ULYSSE
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