Virée en Aveyron - 5 - Conques : Un joyau de pierre
Depuis quelques semaines nous sommes allés à la découverte des beautés architecturales et naturelles de l’Aveyron. Nous allons finir ce périple en beauté par la visite du joyau de ce département et l’un des plus beaux de France : le village de Conques et de son abbatiale Ste Foy. Avant de pénétrer dans ce village, il faut d’abord aller l’admirer du site de Bancarels qui le surplombe et où l’on prend toute la mesure de la beauté et de l’harmonie de ce lieu.
Conques est une modeste bourgade dont les élégantes et antiques maisons s’accrochent aux pentes escarpées des gorges de l’Ouche et servent d’écrin à une magnifique église romane, vestige d’une abbaye qui hébergea au cours des siècles les innombrables pèlerins se rendant à St Jacques de Compostelle. Elle est dédiée à Ste Foy martyre chrétienne qui fut cuite sur un lit d’airain et décapitée, à l’âge de treize ans, à Agen, en 303, après avoir comparu devant le tribunal de Dacien proconsul romain durant le règne de l’empereur Maximien. Une légende raconte que ses restes qui reposaient dans une église dAgen furent volés par un moine de Conques afin d’attirer les pèlerins dans ce nouveau lieu.
Les murs de cette abbatiale qui se dresse fièrement au coeur du village sont constitués d’un heureux mélange de pierres de taille ocre et de briquettes de terre cuite et de schiste.
De l’ancien cloître ne subsiste qu’une sobre et harmonieuse galerie ouverte gracieusement au public et où l’on peut flâner à sa guise.
L’ensemble des bâtiments sont d’une grande sobriété et élégance, c’est l’un des édifices romans majeurs, édifié à partir de 1031 pour être achevé en 1125.
Il comporte un magnifique tympan dont les sculptures illustrent le jugement dernier. Il était peint à l’origine comme en témoignent les quelques traces de peinture qui subsistent. Grâce à la magie des nouvelles technologies, vous le découvrirez avec ses peintures originelles à la fin de cet article. Mais prenons le temps au préalable de l’admirer.
Il montre ainsi dans sa partie basse la répartition des défunts entre ceux (vers la gauche) qui sont admis au paradis et sont accueillis par Jésus et ceux (vers la droite) qui sont condamnés à l’enfer et entrainés de force par des diablotins dans la gueule d’un monstre qui les recrache au pied de Lucifer ! Il y a de quoi impressionner les croyants passant sous ce porche et les inciter à bien se conduire et à ne pas se soustraire à la quête dominicale ! Pauvres naïfs quand on voit ce que faisait le haut clergé des sommes ainsi collectées !
Quand on entre dans l’édifice, on est subjugué par ses dimensions exceptionnelles pour un édifice roman. La voute s’élève ainsi à 22,10 mètres et la coupole au dessus du transept à 26,40 mètres.
Elle est exceptionnellement lumineuse pour un édifice roman, la lumière mettant en valeur la couleur chaleureuse des pierres de taille avec lesquelles elle est construite.
La lumière pénètre par des vitraux conçus par le peintre Soulages (le porte-drapeau du noir en peinture) que je n’apprécie guère comme peintre mais dont les vitraux s’harmonisent parfaitement avec la sobriété de l’abbatiale. A propos de couleur, compte tenu du "wokisme"anglo saxon qui nous submerge, je suis étonné que personne n'ait encore contesté qu'un "blanc" puisse peindre du "noir" !
L’édifice comporte 250 admirables chapiteaux sculptés par plusieurs générations de sculpteurs au fil de l’avancement de l’édification de l’abbatiale. Certains sont d’une très grande richesse iconographique comme celui-ci qui représente les prophètes Daniel et Habacuc.
Cet autre représente un combat féodal, scène étonnante dans un lieu sacré.
Infiniment expressif et émouvant est ce Christ qui orne l’une des chapelles latérales. Tant de souffrance parfaitement inutile vu la façon dont se conduisent ceux pour qui il s’est sacrifié !
Nous retournons visiter l’abbatiale à la nuit tombée après avoir succombé au péché de gourmandise en se régalant d’un délicieux aligot à l’auberge St Jacques toute proche. Elle se dresse, somptueuse, au coeur de la nuit, imposant témoignage de la capacité de l’homme à dompter les lois de la gravité.
Les jeux d’ombres et de lumière mettent en évidence l’élégance de ses formes et l’étonnante jeunesse de cette noble «dame» de mille ans !
Et soudain un miracle se produit : peu à peu le tympan retrouve ses couleurs originelles…
….qui soulignent la munificence des sculptures qui l’ornent. Les tympans d’église étaient les BD du moyen âge !
On pénètre alors dans l’abbatiale inondée de lumière qui confère à ses piliers une légèreté inouïe.
Alors que l’orgue retentit nous déambulons dans une somptueuse forêt de pierre.
Même si on ne croit pas au dieu qui est célébré en ce lieu, on ne peut que s’interroger sur la source de cette beauté, sur la capacité qu’à l’homme de concevoir de telles oeuvres. Cela reste un mystère qui invite à la tolérance et à l’humilité.
On y célèbre bien évidemment Saint Jacques l’un des apôtres qui évangélisa l’Espagne et sur les traces duquel cheminent aujourd’hui tant de pèlerins.
La lumière confère aux personnages des chapiteaux une aura mystérieuse, leur orbites vides semblant contempler un royaume qui nous échappe pauvres mortels mais auquel nous sommes peut être destinés ?
Je ne saurais dire si ce personnage qui semble porter la voute sur ses épaules rit ou grimace. Que voit-il donc ? Les portes de l’enfer ou celles du paradis ?
Dans un recoin de l’abbatiale, on croise Marie ce personnage qui confère tant de douceur au christianisme qui a par ailleurs conduit à tant de crimes. Ah! Si sur terre nous donnions le pouvoir aux femmes, je pense que tout irait mieux ! Nous n’aurions plus ces combats de coqs stupides qui nous conduisent vers l’abîme !
A coté de l’abbatiale se trouve une salle du Trésor qui recèle un ensemble d’orfèvrerie médiévale le plus riche de France. On y découvre notamment une sculpture de Ste Foy couverte d’or et de pierres précieuses datée de l’époque carolingienne.
C’est l’un des paradoxes de l’église catholique fondée sur la parole du Christ qui prône la pauvreté que d’afficher un apparat ostentatoire dans la pratique de son culte. D’ailleurs n’y a-t-il pas de la tristesse dans les yeux de Ste Foy qui semblent dire «Mon dieu libère moi de toute cette verroterie dont les hommes m’ont affublée».
Après une paisible nuit passée à l’Hôtel Saint Jacques (que je vous recommande) nous nous levons alors qu’une écharpe de brouillard envahit le rues du village.
Le soleil qui se lève et transperce le brouillard confère un aspect féérique au paysage.
Nous jetons alors un dernier coup d’oeil à l’abbatiale qui semble flotter entre terre et ciel, comme un pont lancé vers le paradis?
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Texte & Photos Ulysse
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