Virée en Espagne - 2 - Le Vall de l’Artiga de Lin et le Llano de Béret
Aujourd’hui, nous partons randonner et pour la matinée nous avons prévu de nous rendre à la résurgence d’un torrent appelée «Uelhs deth Joeu» qui veut dire «les Yeux du Diable ou de Jupiter», phénomène exceptionnel car ce sont les eaux du glacier de l’Aneto qui réapparaissent à cet endroit après avoir parcouru plus de 4 km sous terre. Pour l’heure nous cheminons au sein de la dense forêt qui recouvre les flancs des monts où dévale le torrent.
Le sentier longe par endroits le torrent issu de la résurgence située bien plus haut.
La fougue du torrent emplit le vallon d’un vacarme d’enfer qui justifie pleinement son nom. Habituellement, je mets un point d’honneur à me baigner dans les torrents de montagne que je croise mais là un bain n’est pas au programme !
Après une heure de grimpette où notre pompe cardiaque s’active autant que le torrent, nous parvenons à la résurgence qui recouvre le pierrier sur lequel elle s'étale d’un voile de mariée.
Puis nous continuons à remonter le cours du torrent pour gagner le magnifique cirque glaciaire qui s’étale au pied d’un massif montagneux que dominent le pic de la Maladeta (3308m) et l’Aneto (3408m) que masquent les montagnes que l’on voit en première ligne.
Au fur et à mesure que les montagnes s’érodent et créent à leurs pieds des pierriers les arbres les colonisent, vaillants montagnards qui aident ainsi à les stabiliser.
Qui n’a pas un jour cheminé au pied de ces pyramides pierreuses d’où des dizaines de millions d’années nous contemplent n’a pas éprouvé la petitesse et fragilité de l’homme mais aussi son incomparable courage et ténacité qui le mènent à leur sommet là ou aucune autre bête, sinon les aigles, vont.
L’air des cimes, quand on y accède pedibus jambis rend euphorique. Cette beauté majestueuse emplit notre âme de sérénité, pour celles et ceux qui en ont une car il n’est pas sûr que Vladimir et Donald en soit dotés ! Certes, elle peut aussi provoquer des drames comme cela s’est produit à la Bérarde ou à Bretten mais, à l’instar des marins, les montagnards savent que leur vie est à la merci des éléments et des «incartades » de la nature ce qui forge leur tempérament.
Midi ayant sonné aux églises des villages de la vallée, nous redescendons pour aller reprendre quelques forces à la table du «Gourmand» délicieux restaurant de Vielha qui fut notre principale «cantine» pendant notre séjour.
Puis nous remontons avec notre monture jusqu’au «llano » (plateau) de Beret à près de 1900mètres d’altitude pour y effectuer notre seconde randonnée.
Compte tenu des efforts faits le matin et du souci d’assurer une digestion paisible, nous avons choisi une randonnée tranquille qui nous fait traverser les vastes alpages de ce plateau d’altitude environnés de massifs montagneux.
Derrière nous se profile l’ensemble du massif de l’Aneto et de la Maladeta relativement peu enneigé en ce début juin. Les glaciers fondent provoquant ici et là des drames et menaçant une pénurie de glaçons dans les pastis de cet été !
Nous sommes seuls et avons le sentiment d’être à des milliers de kilomètres de nos chaumières quelque part sur les hauts plateau de la Mongolie.
Mais pour l’heure nous sommes déçus de ne pas voir d’animaux hormis ce crâne d’un mouflon peut être mort de faim au cours d’un hiver ou de vieillesse après une belle vie que ne connaissent pas les millions d’animaux que l’on maltraite dans les fermes industrielles.
Nous croisons une narcisse des poètes dont la couronne interne jaune pâle est bordée de rouge. Une légende en explique l’origine : Narcisse fils d’une nymphe et du fleuve Céphise était si beau que tous ceux qui le voyaient en tombaient amoureux. Le divin Tirésias avait dit à sa mère «Narcisse vivra très vieux à condition qu’il ne se regarde jamais». Malheureusement, Narcisse était indifférent à tous ceux qui l’entouraient, semant le malheur autour de lui (dont la nymphe Echo si malheureuse d’être repoussée par lui que seule sa voix subsista). Un jour, fatigué, Narcisse se reposa près d’une source, se pencha pour boire et tomba éperdument amoureux de son image. Désespéré par cette situation inextricable il se plongea un poignard dans le cœur. De son sang qui s’écoulait naquit une narcisse blanc au cœur rouge. Signalons aussi qu’en juin les faucheurs de fleurs en Lozère ramassent ces fleurs odorantes pour les parfums de Grasse .
La fonte des neiges alimente un ruisseau intermittent dont le cours placide crée des flaques où se mire le bleu du ciel.
Nous passons près d’une harde de chevaux qui se gavent de l’herbe tendre mise sans limite à leur disposition et dont la vue nous enchante. La plus belle conquête de l'homme selon George Louis Leclerc de Buffon vit ici en totale liberté.
Nous sommes en quelque sorte au paradis quand les hommes cohabitaient respectueusement avec les animaux, avant que les sbires de l’agro-industrie et de la chimie ne décident de faire de la nature un mouroir et un cocktail de poisons non pas pour nourrir l'humanité mais pour remplir leur « tiroir caisse ».
Heureusement, il y encore des humains qui laissent leurs animaux vivre une vie digne et que l’on peut ainsi approcher sans qu’ils ne soient effrayés.
Nous souhaitons une longue vie à ce poulain qui jouit de la présence de sa mère dans un environnement paradisiaque.
Je vous invite écouter ma chanson
"Les êtres chers qui sont partis devant"
sur mon blog Canta-la-Vida
(lien dans la barre de titre de ce blog)
PHOTOS & TEXTE ULYSSE
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