A l’assaut du Vissou
Je n’adhère pas au proverbe «Peu importe le flacon pourvu que l’on ait l’ivresse» et ne verse pas dans mon gosier n’importe quel breuvage alcoolisé, ayant à cet égard le bonheur de vivre en Languedoc, riche en nectars variés. Mais en matière de montagne, je ne fais pas la fine bouche et même si j’affectionne les Pyrénées ou les Alpes et bien évidemment le Caroux, je ne dédaigne pas, à l’occasion, faire un petit sommet, comme ce modeste pic de Vissou (482m) qui s’élève à quelques encablures de mon antre. Nous voici donc partis à sa conquête avec mon copain Jo en ce frais mais beau matin de mars.
C’est une vieille montagne de 365 millions d’années qui émerge au milieu de collines recouvertes de forêts de chênes verts et de vignes. Elle est née du soulèvement des couches sédimentaires, laissées par une ancienne mer, provoqué par la surrection de la chaine hercynienne dont le massif de l’Espinousse et le Caroux sont les vestiges.
Il est au cœur du terroir de l’excellent vignoble de Cabrières, dont les vins étaient appréciés dit-on par Louis XIV. Comme quoi les scélérats savent malgré tout reconnaître les bons vins !
Des forêts de chênes verts se pressent au pied du pic dont certains, passés de vie à trépas, servent de supports à de magnifiques colonies de trémelles foliacées, champignons arboricoles très décoratifs mais sans intérêt gustatif.
Le sommet à beau être modeste, le sentier qui y mène fait battre la chamade à nos cœurs bien qu’aucune belle ne nous y ait donné rendez-vous. Mais à vrai dire, si c’était le cas je ne vous en ferais pas la confidence !
Derrière nous, se dresse la montagne de Liausson dont le versant sud domine le pittoresque village ainsi que l’étonnant cirque de Mourèze et le versant nord, le lac du Salagou, lieux à visiter impérativement si vous venez dans la région. Ce blog leur a déjà consacré quelques articles notamment ICI et LA.
Nous voici au sommet où l’érosion a mis à nu les os de Gaïa qui malgré ses quatre milliards d’années conserve à nous yeux éblouis un charme fou, d’autant que la brume masque les meurtrissures que l’homo sapiens, ce sinistre bipède, lui inflige un peu partout.
Au sommet se dresse une tour pour la surveillance des incendies qui a été taguée en bleu, ce que semble apprécier cet escargot qui l’a peut être prise pour un milieu aquatique. Toujours est-il que sa position à hauteur d’homme m’a permis de découvrir la magnifique décoration de sa coquille! La beauté est partout mais hélas un grand nombre d’entre nous sont sur ce point aveugles !
L’heure du pique-nique n’ayant pas encore sonné, nous dévalons la pente en direction du Vissounet dont le sommet pierreux se profile au loin. Quel bonheur de crapahuter loin de ce monde qui devient fou où les milliardaires se gavent de dividendes et où les adolescents, fascinés par des jeux vidéos violents, influencés par des cancrelats terroristes à la foi dévoyée, stimulés par des réseaux sociaux délétères où les adorateurs du nombril déversent leur haine, s’entretuent pour un regard, une parole ou même sans autre motif que de n’être pas né dans le même quartier ! L’homo sapiens est en train de devenir l’homo démens !
Mais il suffit de contempler l’élégance, la finesse, la beauté rayonnante d’une orchidée qui salue l’arrivée prochaine du printemps pour retrouver sa sérénité.
Nous voici rendus au Vissounet où environné d’une nature radieuse et sauvage nous nous installons pour rendre hommage à Dionysos et Ploutos afin de redonner de la vigueur à nos vieilles jambes.
Puis nous passons quelques instants dans les bras d’Hypnos allongés au milieu des asphodèles à défaut de jolies nymphes. Mais à vrai dire vu notre âge nous n’en sommes pas frustrés !
Etant redescendus sur le plateau, nous longeons un torrent dont le cours est ponctué d’une jolie cascade. Bien que la température de l’air soit de 15° et que celle de l’eau ne doit pas dépasser les 10° nous voyons là l’occasion d’un bain revigorant.
Mais pour nous y rendre nous devons jouer à saute ruisseau ce qui à notre âge est toujours un peu périlleux !
Mais nous arrivons sans encombre à la cascade où nous nous baignons avec ravissement, déçus toutefois de ne pas être rejoints par quelques ondines.
Cette revigorante baignade nous a redonné des forces pour grimper un petit raidillon menant à un promontoire offrant une superbe vue sur le pic de Vissou.
Les paysans qui autrefois le cultivaient y ont édifié une superbe capitelle qui se révèle néanmoins un peu étroite pour y passer la nuit. Et puis nos provisions solides et liquides sont épuisées, ce qui nous conduit à retourner dans nos pénates pour y célébrer dignement la fin de cette magnifique journée.
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Texte & Photos Ulysse
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